Le chalet du Bois Flotté se dépose avec simplicité sur les terrasses en pente légère surplombant Cap-à-l’Aigle et dominant le fleuve. On peut y observer, au loin, La Malbaie et le lent mouvement des marées. Il rappelle les premières habitations qui ont été érigées le long de la vallée du Saint-Laurent avec ses toits à deux versants sur des volumes rectangulaires, devenus archétypes de la maison de rang.
Deux corps de bâtiment s’assemblent perpendiculairement pour former une composition aussi rustique que raffinée. L’acier de la toiture, qui se prolonge parfois pour envelopper les murs, et le bardage de cèdre des pignons, également présent dans certaines portions des murs latéraux, forment un ensemble étonnant. L’oxydation de l’air marin viendra donner graduellement au cèdre cette teinte argentée caractéristique des habitations de bord de mer. Les formes sont régulières et se découpent pour mieux cadrer le paysage et permettre l’accès au terrain par la terrasse à l’angle des deux volumes. De larges ouvertures vitrées permettent aux occupants d’observer la nature. Le projet s’ancre en ce lieu, tel un bout de bois, flotté par le temps et les courants, offrant un havre de repos, humble et discret, niché dans la beauté du paysage. Une économie de moyens, une simplicité des lignes qui ne négligent pas le confort nécessaire à la contemplation et à la mise en valeur du panorama. Une modestie désirée, une discrétion assumée sous les cieux flamboyants de Charlevoix.
L’aménagement intérieur s’articule sur deux axes de circulation. Chaque espace est conçu pour répondre aux besoins des occupants dans une approche minimaliste, à la scandinave. Les dalles de béton polies se déposent sur le sol, en deux demi-niveaux, permettant d’augmenter le volume intérieur des espaces de séjour, ouvert sur le paysage par un immense mur de verre couvrant la totalité du pignon ouest. Une échelle mobile donne accès à une petite mezzanine, véritable prolongement des chambres d’enfants situées dessous. Elle offre une aire de jeux et de détente en retrait du monde des adultes.
Le chalet du Bois Flotté c’est aussi l’histoire de rencontres dont les clients occupent la place centrale. C’est ainsi qu’ils les résument : « C’est avant tout un coup de cœur pour le site magnifique des “Terrasses Cap-à-l’Aigle” qui est à l’origine du projet. Lors de nos vacances familiales, à l’été 2016, nous avons été séduits par la une vue imprenable sur le fleuve Saint-Laurent, les ciels changeants et les couchers de soleil à couper le souffle, offrant selon les jours et les saisons, des paysages toujours renouvelés! Nous voulions un nouvel espace de vie de famille coupé de la routine et de la grande ville où nous pourrions venir nous ressourcer entre nous et entre amis. Chaque membre de la famille a imaginé un morceau du projet. C’était une façon de nous enraciner un peu plus au Québec et de concevoir un “chez-soi” qui nous ressemble. Imaginer des espaces et des ouvertures qui mettent en valeur un paysage aussi grandiose était une façon pour nous de rendre hommage à cette terre d’accueil. Les espaces sont pensés afin d’offrir à chacun son petit coin à lui, tout en favorisant les moments passés en famille. Enfin, c’est une histoire d’alchimie avec notre architecte qui a su saisir la nuance entre une maison de vacances et un chalet de fin de semaine, et qui s’est laissé séduire par le site et inspirer par notre projet. »
Ce sont toutes ces conjonctures qui ont donné naissance au Chalet du Bois flotté. Ses couleurs rappellent celles du bois, drossé sur la côte par l’action du vent, des courants ou des marées. Ce projet est tel le morceau de bois qui a flotté longtemps dans l’eau salée où il a participé au biotope, fournissant abri ou nourriture aux petits animaux marins, poissons ou autres espèces aquatiques, et peut désormais servir d’abri aux oiseaux ou à d’autres espèces animales et permettre la pousse de certaines plantes maintenant qu’il est sur la terre ferme.
La conception du projet se fait avec, en toile de fond, ce désir d’harmonie avec la nature. Construire avec une économie de moyens financiers force à réduire les superficies, ce qui permet de réduire l’empreinte écologique autant que l’empreinte au sol. C’est une occasion de construire écologiquement, une occasion de se demander comment occuper l’espace sans prendre toute la place. L’implantation compacte de la construction permet de conserver intact l’aspect naturel du site. Ce qui pourrait être considéré comme une contrainte démotivante a plutôt été abordée comme un défi créatif stimulant qui permet de trouver des réponses simples à certains problèmes complexes. Alors que la taille des ménages n’a cessé de diminuer depuis les cinquante dernières années, la superficie des habitations n’a, quant à elle, cessé de croître*. On ne saurait compenser cet accroissement des superficies par les avancements technologiques qui requièrent la production d’équipement et de composantes électroniques nécessaires pour faire des habitations « performantes ».
Afin d’assurer une intégration harmonieuse du projet avec le site, des maquettes physiques et virtuelles du terrain ont été réalisées dans le but de concevoir un projet qui se dépose sur le sol naturel tout en créant des vues sur le fleuve. Mettant en relation certains endroits choisis du chalet avec les côtes montagneuses de Pointe-au-Pic et de La Malbaie. À cet effet, un coin lecture et contemplation (nook) a été spécifiquement aménagé dans l’espace de circulation menant aux chambres, face à un mur de verre, par lequel on peut également rejoindre la terrasse extérieure et le terrain, créant une connexion réelle avec la nature environnante.
* Barkenbus, Jack. 2008. « Supersizing the American Dream in an Era of Climate Change ». Environmental Law Institute 38 (12).
Architecture & Design intérieur: atelier BOOM-TOWN
Photo: MAXIME BROUILLET